Acouphènes et bourdonnements aux oreilles causés par les médicaments : ce qu’il faut savoir

Acouphènes et bourdonnements aux oreilles causés par les médicaments : ce qu’il faut savoir

Vous entendez un bourdonnement constant dans les oreilles, même quand tout est silencieux ? Vous venez de commencer un nouveau médicament, et soudain, ce bruit est là, jour et nuit. Ce n’est pas dans votre tête. C’est peut-être un effet secondaire rare, mais bien réel, de certains traitements : les acouphènes induits par les médicaments.

Qu’est-ce que l’ototoxicité ?

L’ototoxicité, c’est quand un médicament endommage l’oreille interne. Ce n’est pas une simple gêne passagère. C’est une atteinte physique aux cellules auditives ou au nerf auditif. Les symptômes ? Des bourdonnements, des sifflements, des grésillements - bref, tout ce qu’on appelle les acouphènes. Parfois, ça va avec une perte d’audition, surtout pour les sons aigus, ou même des vertiges. Ce n’est pas rare : plus de 600 médicaments, sur le marché ou en cours d’essai, sont connus pour causer ou aggraver les acouphènes. Parmi eux, certains sont courants, prescrits pour des maladies bénignes. D’autres sont des traitements lourds, comme la chimiothérapie.

Quels médicaments sont les plus à risque ?

Les médicaments les plus dangereux pour l’audition ne sont pas toujours ceux qu’on imagine. Voici les principales familles à surveiller :

  • Antibiotiques aminoglycosidés : comme la gentamicine ou la tobramycine. Ils sont utilisés contre les infections graves, souvent en hôpital. Leur risque est élevé : jusqu’à 25 % des patients sous traitement prolongé développent une perte auditive permanente. Même les gouttes pour les yeux ou les crèmes contenant ces antibiotiques sont sans danger - c’est uniquement l’administration par voie intraveineuse ou orale qui pose problème.
  • Chimiothérapie : le cisplatine, utilisé pour traiter certains cancers (testicule, poumon, ovaire), cause des acouphènes chez 30 à 70 % des patients. La perte auditive commence souvent par les très hautes fréquences, au-delà de 8 000 Hz, avant d’atteindre les sons de la parole. Là encore, les dommages sont souvent irréversibles.
  • Diurétiques de l’anse : comme la furosémide (Lasix). Prescrits pour l’hypertension ou l’œdème, ils peuvent provoquer des acouphènes en quelques heures, surtout à forte dose. Heureusement, dans la plupart des cas, ça disparaît quand on arrête le traitement.
  • Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) : l’aspirine à très haute dose (plus de 4 000 mg par jour) est un classique. Mais ce n’est plus courant aujourd’hui. Pour un mal de tête, 325 à 650 mg ne cause presque jamais d’acouphènes. En revanche, certains patients prennent 800 mg d’ibuprofène trois fois par jour pour une douleur aiguë - et là, des cas de bourdonnements sont rapportés dans les forums, avec disparition après 5 à 7 jours d’arrêt.
  • Isotrétinoïne (Accutane) : ce traitement pour l’acné sévère est associé à des acouphènes chez environ 5 % des utilisateurs, selon certaines études. Le fabricant affirme moins de 1 %, mais les témoignages patients sont suffisamment nombreux pour qu’on le mentionne comme un risque possible.
  • Quinine : utilisée autrefois contre les crampes, maintenant presque exclusivement pour les paludismes résistants. Les acouphènes apparaissent souvent dans les 24 à 72 heures, et disparaissent en 1 à 2 semaines après l’arrêt.

Et les antidépresseurs, les anxiolytiques ?

Beaucoup de gens s’inquiètent en voyant « acouphènes » dans la liste des effets secondaires de leur sertraline (Zoloft) ou de leur fluoxétine (Prozac). La vérité ? C’est rare. Moins de 1 % des patients. Mais ça arrive. Et parfois, c’est même en arrêtant le médicament que les acouphènes apparaissent - un effet de sevrage. Ce n’est pas un signe que le traitement a échoué. C’est une réaction neurologique possible. Les benzodiazépines (comme le lorazépam) peuvent aussi causer des bourdonnements, mais surtout après plusieurs mois d’utilisation continue.

Les acouphènes sont-ils permanents ?

C’est la question qui fait peur. La réponse dépend du médicament. Pour 60 % des cas, les acouphènes disparaissent complètement après l’arrêt du traitement. C’est vrai pour les AINS, les diurétiques, la quinine, et même souvent pour les antidépresseurs. Mais pour les aminoglycosides et le cisplatine, les dommages peuvent être irréversibles. Il n’y a pas de miracle : si les cellules auditives sont détruites, elles ne repoussent pas. C’est pourquoi la prévention est cruciale.

Une oreille transparente avec des cellules endommagées par des gouttes rouges, observée par une chouette sage.

Que faire si vous avez des acouphènes en prenant un médicament ?

Ne vous arrêtez pas vous-même. Jamais. Même si vous pensez que c’est le médicament, couper un traitement sans avis médical peut être dangereux. Une infection non traitée, un cancer non contrôlé, une hypertension non maîtrisée - ça peut être pire que les bourdonnements.

Parlez à votre médecin. Dites-lui exactement quand les acouphènes ont commencé, à quel moment par rapport à la prise du médicament, et s’ils ont changé depuis. Votre médecin pourra :

  • Vérifier si le médicament est connu pour être ototoxique.
  • Évaluer si une dose plus faible suffit.
  • Changer de traitement : par exemple, remplacer un aminoglycoside par un autre antibiotique moins dangereux.
  • Vous orienter vers un audiologiste pour un test auditif de base, surtout si vous êtes sous chimiothérapie ou un traitement long.

Des protocoles existent : dans les hôpitaux, les patients sous cisplatine ou gentamicine ont souvent un bilan auditif avant, puis toutes les 1 à 2 semaines pendant le traitement. C’est de plus en plus courant.

Comment savoir si c’est bien votre médicament ?

Les acouphènes induits par les médicaments ont souvent un profil caractéristique :

  • Ils apparaissent dans les 2 semaines suivant le début du traitement - 70 % des cas se déclarent dans ce délai.
  • Ils sont souvent bilatéraux (dans les deux oreilles).
  • Ils s’aggravent avec la dose.
  • Ils s’améliorent ou disparaissent après l’arrêt.

Si vous avez des acouphènes depuis des années, et que vous venez de commencer un nouveau médicament, c’est probablement une aggravation. Si vous avez toujours eu une ouïe normale, et que le bourdonnement est soudain, c’est un signal d’alerte.

Quels sont les autres facteurs qui augmentent le risque ?

Vous n’êtes pas tous égaux face à l’ototoxicité. Certains facteurs rendent votre oreille plus vulnérable :

  • Les problèmes rénaux : les médicaments ototoxiques sont souvent éliminés par les reins. Si vos reins ne fonctionnent pas bien, le médicament s’accumule dans le sang et augmente le risque.
  • Les antécédents de perte auditive ou d’acouphènes : vous êtes déjà plus sensible.
  • L’âge : les cellules auditives vieillissent. Les personnes âgées sont plus exposées.
  • Une exposition bruyante : le bruit et les médicaments agissent ensemble pour endommager l’audition.
  • Des facteurs génétiques : des recherches récentes montrent que certaines personnes ont des variations génétiques qui les rendent plus vulnérables. Des tests génétiques pourraient un jour permettre de personnaliser les traitements.
Un patient et un médecin marchent ensemble, des feuilles d'audiogramme flottent comme des grues de papier.

Que faire pour protéger votre audition ?

La meilleure défense, c’est la vigilance :

  • Ne prenez jamais un médicament sans connaître ses effets secondaires. Lisez la notice, demandez à votre pharmacien.
  • Signalez tout changement auditif immédiatement, même si ça semble léger.
  • Évitez les bruits forts pendant un traitement ototoxique.
  • Si vous êtes sous chimiothérapie ou un antibiotique puissant, demandez un bilan auditif avant de commencer.
  • Ne mélangez pas plusieurs médicaments ototoxiques sans avis médical. Par exemple, ne prenez pas d’AINS à haute dose en même temps qu’un diurétique.

Il n’y a pas de solution miracle… mais il y a de l’espoir

Il n’existe pas encore de pilule pour réparer l’oreille endommagée. Mais les chercheurs travaillent dessus. En 2024, les NIH ont alloué 12,5 millions de dollars à la recherche de molécules « otoprotectrices » - des substances qui protègent l’oreille sans réduire l’efficacité du médicament. Certaines sont déjà en phase 2 d’essais cliniques.

En attendant, les thérapies comme la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) ou la thérapie sonore (bruits blancs, sons apaisants) aident 60 à 70 % des patients à mieux vivre avec les acouphènes. Ce n’est pas une guérison, mais ça réduit la souffrance. Et c’est déjà énorme.

Le mot de la fin

Les acouphènes causés par les médicaments ne sont pas une fatalité. Ils sont souvent réversibles. Mais ils sont aussi sous-estimés. Beaucoup de médecins généralistes ne pensent pas à les évoquer. Seuls 35 % d’entre eux font un dépistage de risque avant de prescrire un traitement potentiellement ototoxique.

Vous êtes le premier observateur de votre corps. Si vous entendez un bruit nouveau, bizarre, persistant, ne le minimisez pas. Parlez-en. Votre audition vaut la peine d’être protégée - même si vous prenez un médicament essentiel pour votre santé.

Les acouphènes causés par un médicament peuvent-ils disparaître ?

Oui, dans environ 60 % des cas. C’est souvent le cas avec les AINS, les diurétiques, les antidépresseurs ou la quinine. Dès que le médicament est arrêté, les bourdonnements s’atténuent en quelques jours ou semaines. En revanche, pour les antibiotiques comme la gentamicine ou les traitements comme le cisplatine, les dommages peuvent être permanents. C’est pourquoi il est crucial d’agir vite.

L’aspirine à faible dose peut-elle causer des acouphènes ?

Pour la plupart des gens, non. À doses courantes (325 à 650 mg par jour), l’aspirine ne cause presque jamais d’acouphènes. Mais chez une très petite minorité de personnes particulièrement sensibles, même une dose faible peut déclencher un bourdonnement. Si vous avez déjà eu des acouphènes après une prise d’aspirine, même faible, évitez-le et parlez-en à votre médecin.

Les gouttes pour les yeux ou les crèmes peuvent-elles causer des acouphènes ?

Non, pas avec les antibiotiques aminoglycosidés. Le risque existe uniquement quand ces médicaments sont absorbés dans le sang - c’est-à-dire par voie orale ou intraveineuse. Les gouttes pour les yeux ou les crèmes topiques ne pénètrent pas assez profondément pour affecter l’oreille interne. Vous pouvez les utiliser sans crainte.

Faut-il faire un bilan auditif avant de prendre un médicament risqué ?

Si vous êtes sur un traitement à haut risque - comme la chimiothérapie, une antibiothérapie intraveineuse prolongée, ou un diurétique à forte dose - oui, c’est recommandé. Un bilan auditif de base permet de comparer avant et après. Si une perte auditive apparaît, on peut ajuster le traitement. Même si vous n’êtes pas en hôpital, demandez à votre médecin si un test est nécessaire.

Les acouphènes sont-ils un signe que mon traitement ne marche pas ?

Non. Les acouphènes sont un effet secondaire sur l’audition, pas un indicateur d’efficacité du traitement. Votre antibiotique peut très bien éliminer l’infection, même si vous entendez un bourdonnement. Votre chimiothérapie peut encore arrêter la croissance des cellules cancéreuses, malgré les acouphènes. Ce n’est pas un échec thérapeutique - c’est un risque à gérer.

Y a-t-il des médicaments pour traiter les acouphènes eux-mêmes ?

Aucun médicament ne guérit les acouphènes. Mais des approches comme la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) ou la thérapie sonore (utilisation de bruits blancs ou de sons apaisants) aident 60 à 70 % des patients à mieux vivre avec. Elles ne font pas disparaître le bruit, mais elles réduisent l’anxiété et la gêne qu’il provoque. Ce sont les meilleures options actuelles.

Les acouphènes causés par un médicament peuvent-ils revenir après l’arrêt ?

Rarement, si les dommages sont réversibles. Mais dans certains cas, surtout après un traitement long ou à forte dose, les acouphènes peuvent persister. Ce n’est pas une rechute : c’est que les cellules auditives ont été endommagées de façon permanente. Dans ce cas, la gestion devient à long terme, avec des aides auditives ou des thérapies comportementales.

2 Commentaires
  1. Cassandra Hans

    Je suis désolée, mais je dois dire que ce post est une catastrophe médicale en forme d’article… Vous avez cité 600 médicaments ototoxiques, mais vous n’avez pas mentionné que la plupart des gens prennent 3-4 médicaments en même temps… Et là, vous avez un effet cumulatif… Et personne ne le dit… Personne… C’est un piège…

  2. Sandrine Hennequin

    Je viens de finir un traitement à la furosémide pour un œdème, et j’ai eu des bourdonnements pendant 10 jours. J’ai arrêté, et en 5 jours, c’est parti. Je savais que c’était ça, parce que j’avais lu un article similaire. Mais j’ai failli ne rien dire à mon médecin, j’avais peur qu’il pense que je délire… Merci pour ce post, il m’a fait sentir moins seule.

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